La salle des Curiosités de l'hôtel Salomon de Rothschild

Hôtel Salomon de Rothschild

  La salle des Curiosités  

Singulier par ses vitraux et ses cuirs décorant les murs, riche de ses collections de porcelaines, d'objets décoratifs ou de curiosité d'Extrême-Orient, de mobilier, de jades, et d’une collection exceptionnelle d'armes, il s’agit aujourd’hui du dernier exemple de cabinet des demeures Rothschild conservé dans un état très proche de l’état d’origine ; il forme un concentré de l’hôtel particulier du vivant de la baronne.

Loin des « wunderkammer » du XVIe siècle, ce cabinet de curiosités est plus près des pièces en vogue au XIXe siècle et des grands traits de l’architecture, développés dans la plupart des hôtels construits par la famille Rothschild à travers toute l’Europe, à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle.

Hôtel Salomon de Rothschild, Salle des Curiosités, fin du XIXe siècle.

Comme dans d’autres demeures de l’illustre famille – rue Laffitte dans l’hôtel de James de Rothschild, à Waddesdon en Angleterre dans le manoir de Ferdinand ou à Paris encore, rue Monceau dans l’hôtel d’Adolphe – le cabinet de curiosités de l’hôtel de la rue Berryer est une pièce à la fois isolée dans la demeure mais accessible par les familiers de la maison comme par les visiteurs extérieurs qui, comme cela se pratiquait à l’époque, pouvaient accéder à ce petit musée personnel, sans troubler la vie de la maison.

Ouvert sur les principales circulations de l’hôtel particulier, il est néanmoins préservé par un couloir qui le ceint sur trois côtés et qui lui donne l’aspect d’un Saint des saints, d’une pièce gigogne, d’une boite dans la boite. Il est souvent désigné sur les plans comme « fumoir ». De cette conception, résulte le curieux agencement de l’éclairage par trois fenêtres dans lesquelles ont été intégrés des morceaux de vitraux religieux ou profanes, originaires de Suisse notamment de la ville de Fribourg. Une seule de ces fenêtres, la fenêtre centrale, prend le jour direct de la cour d’honneur. Les deux autres, placées de biais, donnent sur le couloir de ceinture du cabinet et ne sont éclairées qu’en double jour par deux fenêtres donnant sur la cour d’honneur.

Le cabinet constitue un écrin feutré, aux couleurs de la famille, le bleu et le rouge : bleu des cuirs de Cordoue qui le tapissent, bleu turquin du marbre de la grande cheminée Louis XVI ; rouge des velours des tentures. La moquette d’origine est rouge bordée d’une large bande bleue. Au plafond est tendue une chancellerie aux armes de France (bleu) et de Navarre (rouge). On retrouve dans les pièces de porcelaine qui l’ornent l’évocation de cette délicate harmonie comme dans les deux services de table en fonction alors dans l’hôtel dont certaines pièces sont présentées dans le cabinet.

L’aspect de la pièce reste très fortement influencé par le style Napoléon III et les collections sont proches de celles réunies quelques années avant la construction de l’Hôtel par le comte de Nieuwerkerke, surintendant des Beaux-Arts de Napoléon III : panoplies d’armes, pièces d’orfèvrerie allemande du XVIe siècle, céramiques italiennes et espagnoles, antiquités orientales, jades, vitraux anciens, ivoires et verreries mêlés à des pièces raffinées de porcelaine de Sèvres. On y trouve enfin des « faux prestigieux » reproduisant ou imaginant des majoliques dans le goût des Della Robbia, des armes de parade ou des pièces de maîtrise. Fabriqués pour les Rothschild, souvent en exemplaire unique, ce sont de véritables artificialia qui accentuent la théâtralité du cabinet et lui confèrent toute son étrangeté.

Le mobilier du cabinet est un mobilier d’origine conçu pour la pièce et composé de trois vitrines et de deux consoles placées sous les vitraux latéraux. La table néo-Renaissance est également d’origine.

Il faut signaler que les pièces qui étaient présentées à l’origine dans cette pièce étaient essentiellement des pièces de céramique européennes ou orientales. Lors de la restauration du cabinet par la Fondation Nationale des Arts Graphiques et Plastiques en 2001, dans la mesure où une partie des pièces d’origine ont été mises en dépôt dans des collections nationales (Louvre, Cluny, Sèvres…), des objets provenant d’autres pièces de l’hôtel particulier ont pris place dans le cabinet.

La restitution virtuelle de ce cabinet extraordinaire par l’Institut national d’histoire de l’art est une opportunité sans égale pour retrouver l’esprit des Rothschild, leur goût et la richesse des ensembles qu’ils ont constitués. C’est aussi une élégante manière de rendre hommage à leur incroyable générosité à l’endroit de l’État français.

Gérard Alaux, directeur de la FNAGP de 2002 à 2016

Laurence Maynier, directrice depuis 2016

En savoir plus

Il est d'ores et déjà possible de consulter dans AGORHA  toutes les notices illustrées de l'ensemble des objets conservés dans la salle de Curiosités et mentionnés dans l'inventaire après-décès de la baronne en 1922. Pour consulter ces notices, suivre ce lien.

Adresse

11, rue Berryer75008 PARIS  

Sélection d'oeuvres