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Mes enfants, par Jules-Clément Chaplain
Au musée de Grenoble
Jules-Clément Chaplain
(Mortagne-au-Perche, 1839 - Paris, 1909)
Marcel, Maurice, Louise, Suzanne Chaplain dit aussi Mes enfants
1886
Médaillon uniface en bronze fondu argenté
D. : 12 cm
Grenoble, musée de Grenoble, MG 1005 (7) (ancien n° MG 1994-11-4-R)
Don Alphonse de Rothschild en 1895.
Ce médaillon uniface en bronze est l’œuvre la plus personnelle de Jules-Clément Chaplain, qui nous donne à voir le profil de ses quatre enfants.
En 1874, il épouse Marie-Louise Dumont (1853-1922), qui n’est autre que la sœur cadette d’Albert Dumont (1842-1884) que Jules-Clément rencontre en 1864 durant son pensionnat à la Villa Médicis alors que l’archéologue, sur le chemin de l’École française d’Athènes, y séjourne trois mois. De cette union naissent cinq enfants. Le premier, Paul, né en 1876, est absent de la composition car il meurt en 1880. L’aînée, Louise (1877-1951), est placée dans le registre inférieur du médaillon où s’étagent ensuite les profils de Marcel (1879-1966), de Suzanne (1882-1908) et pour finir de Maurice (1884-1886) qui décède peu de temps après l’achèvement de l’œuvre.
Cette composition possède un charme tout particulier et révèle plus que la sensibilité d’un artiste apte à rendre avec naturel les chairs enfantines, la tendresse d’un père pour ses enfants. C’est ainsi que le médailleur, pourtant très respectueux des conventions de son art, assouplit ici son style. Davantage classique dans ses compositions, Chaplain abandonne la symétrie pour disposer librement dans le champ de la médaille les quatre bustes coupés à la naissance des épaules, qu’il oriente tous vers la gauche. Davantage synthétique dans le traitement de ses portraits, Chaplain choisit de rendre avec vivacité et dans un foisonnement de détails chaque mèche des cheveux de Suzanne, les plis de la blouse qui habille Louise ou les joues bien rondes du bébé qu’est encore Maurice. Plus étonnamment, les légendes qui indiquent les prénoms des enfants et leur date de naissance flottent dans les espaces vides alors que la tradition médaillistique voudrait qu’elles s’inscrivent de manière circulaire sur le pourtour de la médaille ou à l’exergue de celle-ci. Enfin, la signature de l’artiste ponctue le centre de l’œuvre et permet symboliquement de replacer le père au cœur de cette fratrie. La date de 1886 mentionne le moment exact de la capture des profils, nous rappelant là une des fonctions premières de la médaille : fixer les traits d’un proche pour le porter à l’immortalité.
Issu du domaine intime et d’abord destinée à rester dans le cercle familial, ce médaillon a pourtant fait l’objet d’une exposition au Salon de 1886. On le retrouve cité au n° 4703 du catalogue dans la session de la gravure en médailles, disposé à côté des effigies des peintres Paul Baudry et Jean-Léon Gérôme, du philanthrope Christachès Zographos ou encore de Victor Hugo. Devant la bonne réception qui lui est offerte, ce médaillon a dépassé son ambition pour devenir une œuvre emblématique de Chaplain. Réalisé en plusieurs exemplaires par le biais de la fonte, le modèle n’a toutefois jamais été adapté à la frappe, un mode de production qui l’aurait encore plus rendu célèbre. Ainsi, on en trouve conservés au musée d’Orsay (Medor 197) ou au département des médailles de la BnF (FL.Chaplain.44) et cet exemplaire du musée de Grenoble, provenant du don d’Alphonse de Rothschild, est symptomatique de l’ambition du collectionneur à rassembler un ensemble le plus exhaustif possible de médailles issues de la production de Chaplain, sans faire de distinction entre les profils des hommes illustres de son temps et ceux des enfants de ce dernier.
Katia Schaal, Institut national d'histoire de l'art, chargée d'études et de la recherche
En savoir plus
Bibliographie
– Schaal, Katia, Jules-Clément Chaplain (1839 - 1909) médailleur, sculpteur et acteur de l'essor de la médaille, mémoire de Master 2 sous la dir. de Béatrice Coullaré et d’Anne Pingeot, École du Louvre, 2012, vol. II, p. 146, cat. 58.
– Mazerolle, Fernand, J.-C. Chaplain, biographie et catalogue de son œuvre, Paris, R. Serrure, 1897, n° 62.
– Migeon, Gaston, « Jules-Clément Chaplain », Art et décoration, jan.-juin 1900, t. VII, pp. 97-104 (illustration du médaillon p. 97).
– Ernest Babelon, « Jules-Clément Chaplain et l’art de la médaille au XIXe siècle », Revue de l’art ancien et moderne, déc. 1909, n° 153, p. 435-450 ; jan. 1910, n° 154, p. 65-76 et p. 109-120.
– Chevillot, Catherine, Papet, Édouard Au creux de la main : la médaille en France aux XIXe et XXe siècles, Paris, Skira-Flammarion ; Musée d’Orsay, 2012 (illustration du médaillon p. 115, n° 107).
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