Almanach de 1715. L’Europe réunie par la paix générale

Au musée du Louvre, département des Arts graphiques, collection Edmond de Rothschild

Anonyme français, Almanach de 1715. L’Europe réunie par la paix générale, département des Arts graphiques du musée du Louvre, collection Edmond de Rothschild

Almanach de 1715. L’Europe réunie par la paix générale

Eau-forte rehaussée de burin
H. : 84,8 cm ; L : 56 cm
Paris, musée du Louvre, département des Art graphiques, collection Edmond de Rothschild, inv. 27251 LR

La publication des almanachs royaux pendant le règne de Louis XIV fut certainement soumise à un strict contrôle de la part des instances du pouvoir. C'est ce dont témoignent les sujets représentés dans ces calendriers complétés des jours de foires adaptés selon la ville d'édition. Ils soulignent la gloire du roi à travers les événements marquants de l'année précédente. Si dans les almanachs du début du XVIIe siècle les figures royales sont encore souvent inscrites dans des médaillons ou dans les bordures entourant le calendrier, au fur et à mesure que le siècle avance l'image gagnera en importance par rapport à l'écrit. De plus, le nombre d'almanachs produits ira croissant tout au long de cette période, reflétant ainsi l'intérêt du roi pour cet efficace outil de propagande. 

Les sujets qui illustrent ces grands placards sont choisis parmi toute l’actualité de l’année précédente. Ainsi, en 1715, la Guerre de Succession espagnole fut un des évènements qui rappelle aux possesseurs des almanachs les efforts politiques de Louis XIV dans le rétablissement de la paix comme l’illustre l’Almanach Royal Représentant l’Union des Princes, par la Paix générale, conclue à Bade, ou bien Barcelone rebelle (27253 LR). La figure du roi dans son rôle de tuteur ou de garant de la justice constitua également un sujet privilégié dans ces œuvres comme nous pouvons le voir dans Le roi protecteur des princes (27254 LR), Le roi assure le repos de ses peuples (27252 LR) ou La justice détruit la fortune des agioteurs (27256 LR), tous conservés dans la collection Edmond de Rothschild. Le roi lui-même est souvent représenté dans la scène principale, mais il arrive également que des villageois ou des paysans soient le centre de ces représentations. C'est le cas de cette estampe qui célèbre le retour à une époque d’accalmie après la signature du traité de Rastatt le 6 mars 1714. Même si la figure du roi est absente, les conséquences de ses actions politiques sont visibles : la pénurie et la détresse sont remplacées par l’abondance et la joie.

Allégorie à la paix de Baden conclue le 7 septembre 1714

À l'instar d'une grande majorité d'almanachs de cette époque, celui-ci fut tiré à partir de deux cuivres imprimés sur deux feuilles jointes au niveau de leur longueur puis collées. Une troisième feuille contenant le calendrier typographié fut collée à l’emplacement laissé vide sur la nappe tombante dans la composition inférieure. Deux scènes festives se déroulent sous nos yeux, entourées par un encadrement décoré de grappes et de rinceaux aux quatre angles. Dans la partie supérieure, une danse réunit les figures de sept nations au-dessous du titre "L'Europe réunit par la Paix" et quatre médaillons. La France, tout à fait à droite, mène le groupe, suivie de l’Espagne, l’Angleterre, l’Allemagne, la Hollande, la Savoie et l’Italie. Même si on distingue des rictus figés, quasi absents, sur les visages des personnages féminins représentant l’Allemagne et l’Espagne, les études de physionomie sont imprécises et cherchent plutôt à représenter un type. La partie inférieure porte le titre de « La Joyeuse Assemblée ou Baccanale au sujet de la Paix » où douze paysans célèbrent allègrement la paix autour d’une table où la boisson circule généreusement.

Le texte a également un rôle à jouer dans cette composition : il décrit et précise ce que l'image donne à voir. À chaque pays correspond un petit dialogue inscrit sur la draperie au-dessous de la première composition. Une douzaine de vers figurent également dans la marge inférieure illustrant les conséquences de la fin de la guerre. Les auteurs de ces vers sont souvent inconnus, rares sont les noms qui nous soient parvenus. Leur activité démontre que ces réalisations devaient être le fruit d'un travail complexe, à plusieurs mains : dessinateur, graveur/s, graveur en lettre et auteurs de vers.

Victoria Fernandez, Documentaliste scientifique, collection Edmond de Rothschild, Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques

En savoir plus 

Bibliographie

- Mathis, Rémi,  Selbach, Vanessa, Marchesano, Louis et Fuhring, Peter (dir.), Les images du Grand Siècle, L’estampe française au temps de Louis XIV (1660 -1715), Paris, Éditions de la Bibliothèque nationale de France, 2015.

- Préaud, Maxime, Les effets du soleil. Almanachs du règne de Louis XIV, XVIIe exposition de la Collection Edmond de Rothschild, cat. de l'ex. (Paris, musée du Louvre, 19 janvier-17 avril 1995), Paris, Réunion des Musées Nationaux, p. 148 et 149, n° 54.

Ressources en ligne

http://arts-graphiques.louvre.fr/detail/oeuvres/1/559506-Almanach-de-1715-LEurope-reunie-pour-la-paix